Les statistiques indiquent qu’il y aura un manque de relève très préoccupant au cours des prochaines années au Québec. Selon une enquête de la Fondation de l’entrepreneurship[1], jusqu’en 2020, on parle de 98 000 entrepreneurs qui iront à la retraite et seulement 60 000 personnes qui désirent reprendre une entreprise. Ce qui représente un déficit de 38 000 repreneurs.
La même enquête indique qu’à peine un entrepreneur sur deux a pu identifier un successeur et n’a pas de plan pour le transfert de direction et de propriété de l’entreprise. Une bonne planification échelonnée sur cinq ans et l’exploration de différents scénarios pour transférer l’entreprise à une relève changeraient certes ce portrait. Amusons-nous donc à regarder cette situation au-delà des chiffres.
À travers mes années d’expérience à assister des entrepreneurs, le sujet de la relève est souvent abordé lorsque cela devient « urgent », soit, entre autres, lorsque l’entrepreneur a des préoccupations sur sa santé, que le quotidien de l’entreprise pèse de plus en plus lourd ou lorsqu’un changement important survient dans le secteur d’activité.
Minuit moins une
Il faut identifier la relève et il n’y a aucune planification pour la continuité de l’entreprise. Il se peut fort bien que la relève ne soit pas prête maintenant et que l’entreprise est « l’entrepreneur ».
Dans ce contexte, la pérennité de l’entreprise se trouve à risque et cela a une incidence directe sur la valeur de l’entreprise. Un autre scénario que je rencontre souvent est, lorsque je pose la question suivante : est-ce qu’il y a une relève potentielle à l’interne? La première réponse est souvent « non » et on a vite le réflexe de vouloir rechercher une relève provenant de l’externe.
Les trésors à découvrir
À multiples reprises, j’ai constaté qu’il y avait une relève potentielle à l’interne qui n’avait tout simplement pas été considérée avec l’angle de la relève. Il se peut qu’une personne ne soit pas prête maintenant, mais qu’elle puisse le devenir avec un plan de transfert de connaissances et en lui permettant d’occuper différents rôles pour la mettre en situation afin de la préparer de façon optimale. C’est d’ailleurs un des aspects où la planification du transfert de direction prend tout son sens et ouvre à une mer de possibilités!
Si nous faisons l’analogie avec le choix d’un conjoint. Vous devez choisir entre deux personnes avec qui vous ressentez une certaine connexion; une personne dont vous avez accès à tout son descriptif écrit et que vous avez rencontrée une ou deux fois ou une personne que vous connaissez déjà et que vous n’avez tout simplement jamais considérée sous l’angle d’un partenaire de vie jusqu’à présent ? En élargissant votre horizon, avec qui tenterez-vous l’expérience en premier?
Je vous invite donc dès maintenant à regarder chacun de vos employés actuels avec l’angle d’une relève potentielle sans égard s’il est prêt maintenant ou non. Il se peut que certaines personnes n’attendent que votre invitation à échanger sur leur futur et à déployer leurs ailes. Certaines personnes se connaissent parfois plus ou moins bien et sous-estiment leur potentiel.
Votre relève est peut-être tout juste à côté de vous. Le temps accompagné d’un plan de transfert est votre meilleur allié pour y mettre de la clarté pour vous permettre de vivre pleinement cette expérience et pour accueillir de nouvelles possibilités pour transférer l’entreprise à des collaborateurs déjà impliqués activement dans l’entreprise. C’est souvent un scénario optimal et harmonieux pour l’équipe, les clients et les « banquiers » qui se sentiront plus confortables dans un contexte du financement de la vente de l’entreprise.
L’ouverture à céder sa place …. Une clé du transfert de l’entreprise
Céder sa place n’est pas toujours facile pour
un entrepreneur. Il se définit et
s’identifie souvent de façon très puissante à son entreprise et il lui est
souvent difficile de « partager » le leadership et la direction de
l’entreprise. Un repreneur en soi est une personne qui désire exprimer son
plein potentiel entrepreneurial et s’il ne voit pas d’ouverture, il risque de
quitter l’entreprise pour aller « réaliser » ailleurs son projet entrepreneurial. Par conséquent, en attendant trop longtemps
avant de commencer la planification
du transfert de direction, la relève potentielle peut se désintéresser, se
décourager et quitter l’entreprise. L’ouverture à céder sa place
progressivement est un prérequis pour mobiliser, engager et préparer
efficacement une relève interne.
Actions à poser pour identifier la relève
Aller prendre un café avec chacun d’eux pour échanger et partager sur leur avenir et celle de l’entreprise. Un simple geste qui pourrait vous surprendre.
Regarder chacun de vos employés avec l’angle de la relève dans un horizon de cinq ans.
Penser à faire un plan pour le transfert de la direction de l’entreprise au moins cinq ans avant de vouloir quitter et être moins impliqué dans l’entreprise. C’est justement le moment de le faire pendant que vous êtes actif et inspiré par votre entreprise.
Est-ce qu’il y a réellement un manque de relève ? Personnellement, j’en doute. J’ai la certitude qu’il y a une magnifique opportunité d’ouvrir davantage la communication entre les cédants et les repreneurs potentiels afin qu’ils puissent co-créer ensemble le futur. Du moins, cela vaut la peine d’être considéré avant de regarder pour une relève provenant de l’externe. C’est une belle occasion de rayonnement pour tous!
Lien vidéo : https://youtu.be/gQodAR7MYK4
[1] « La relève est-elle au rendez-vous au Québec » Centre de vigie et de recherche sur la culture entrepreneuriale, Fondation de l’entrepreneurship, 2010.
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